Edité aux States par Acclaim, société liquidée en septembre 2004, The Bard's Tale a finalement trouvé le chemin de l'Europe en empruntant le radeau aux
milles rondins d'Ubi Soft. Une aubaine pour les adeptes de RPG " old school " qui n'avaient plus rien à croquer depuis
depuis deux mois et la sortie de Demon
Stone chez Atari. Développé par InXile, avec le soutien de Brian Fargo (un pionnier du RPG), The Bard's Tale incarne en fait le remake d'un jeu Apple II sorti en 1985, nommé,
comme c'est original, The Bard's Tale.
C'est en Ecosse qu'est censée prendre place l'aventure. Censée puisque aux dernières nouvelles, il n'y a pas de chaînes de montagnes enneigées sur cette
île, mais dans ce jeu, au ton fortement décalé, on négligera ce détail qui n'a que peu d'importance. En Ecosse donc, un monsieur se promène de taverne en taverne
à la recherche d'alcools toujours plus pétillants, de damoiselles peu farouches et de piécettes étincelantes. Lui c'est un barde avec tout ce qu'il faut d'armes, de poils et
d'instruments magiques. Mercenaire des temps anciens, au cours de l'une de ces quêtes rémunérées, il tombe sur un gros morceau : la plus belle et plus riche des princesses s'est
fait capturer par un méchant sorcier. Prête à réaliser le moindre des désirs du Barde, elle insistera sur le moindre, elle le suppliera de partir à son secours.
Loin d'être valeureux, notre héros intéressé s'en va parcourir les terres écossaises (et ses montagnes glacées) afin de réaliser ses fantasmes.
Si le scénario n'a rien de très original, c'est dans la narration que The Bard's Tale se distingue. Loin des tirades héroïques et des morales à deux balles,
ce jeu use des ficelles de l'humour. Ainsi, le narrateur de l'histoire se fera à de nombreuses reprises réprimander par le barde à cause de répliques un brin trop classiques,
occasionnant très souvent des dialogues cocasses, inutiles pour l'évolution de la quête, mais essentiels pour l'ambiance.
En plus des dialogues pleins de sous-entendus, les passages dans les tavernes, bars et d'autres situations permettent d'ouïr quelques monuments de musique celtique originale. Les plus impliqués
s'amuseront même avec la fonction karaoké mise à disposition lors de ces séquences. Pour ce qui est de la partie audio, il n'y a donc rien à redire. Certains pourront cependant
se plaindre du fait que le jeu soit en anglais sous-titré français, c'est d'autant plus compréhensible que les dialogues défilent à une vitesse bien trop rapide. On rate
alors quelques bouts de phrases, mais plus on progresse, plus nos pupilles s'y habituent (nous laissant l'honneur de contempler les fautes d'orthographes
)
En parlant de pupilles habituées, il faut signaler que le moteur graphique du jeu commence à dater puisqu'il a été créé durant le développement
de
Baldur's Gate : Dark Alliance, sorti début 2001, toujours aux Etats-Unis. Quatre ans tout de même. La
seule chose qui pourrait encore impressionner nos yeux version 2.0.0.5 semble être l'effet de liquide. En effet lorsque l'on se déplace sur une surface aquatique (marre, piscine, etc.), les
remous de l'eau respectent la logique et varient en fonction de la direction prise par le barde et ses acolytes. A côté de cela, rien de très exceptionnel hormis peut-être, et
ce sera tout, ces herbes hautes qui bougent à notre passage. Pour le reste, la forêt, les donjons, les villages ou les bars restent jolis, sans plus. On regrette également que la modélisation
des personnages soit aussi sommaire, un petit effort a été fait pour le barde, mais les taverniers, serveuses, vendeurs et autres PNJ manquent cruellement de finitions. Ceci ne se remarque
que peu lors des phases de gameplay, mais lorsque la caméra commencent à se déplacer pour zoomer sur les personnages lors des dialogues, on constate les dégâts.
Au sujet de la caméra, comme on pouvait en faire la critique sur Dark Alliance, elle se situe encore une fois beaucoup trop à la verticale. Trop au-dessus du héros. On aurait apprécié
pouvoir diriger la caméra autrement qu'en rotation ou en léger zoom (via le stick analogique droit). Modifier l'angle d'une vingtaine de degrés aurait pu arranger beaucoup de choses
pour la visibilité. Ce problème s'estompe en partie grâce à la présence d'une carte à l'écran, indiquant la présence des points de sauvegardes, des
ennemis, des objectifs et des sorties.
Les cinq premières heures de jeu s'avèrent chaotiques notamment à cause de la difficulté. Il faudra s'acharner pour parvenir à trucider son premier Trog
sanguinaire. Quand il attaque seul, pas de souci, mais lorsqu'ils attaquent à plus de deux, les ennuis commencent si bien qu'à force d'essais infructueux, on préférera fuir lâchement
le combat pour vite atteindre le petit point jaune qui sert d'objectif sur la carte. On passera ainsi à côté de nombreux points d'expérience, l'un des vecteurs principaux dans
les RPG. A cette difficulté, il faut ajouter une gestion assez étrange des menus. Tous les changements d'équipements, d'artefacts et d'invocations s'effectuent en temps réel,
par le biais des touches noires (armes magiques), blanches (armes classiques) et des deux gâchettes, droite pour les invocations et gauche pour les artefacts. De quoi s'emmêler les pinceaux
quand on sait qu'il y a 16 invocations disponibles (que l'on appelle grâce à la magie). Ainsi pour appeler la rebouteuse (celle qui nous soigne) il faudra en premier lieu appuyer sur la gâchette
droite pour ouvrir le menu des invocations, puis appuyer sur Y pour accéder à la partie " divers " des magies et enfin appuyer sur B pour l'invocation. Même schéma pour
appeler par exemple le mercenaire : gâchette droite, puis A et encore A. Là où ça coince, c'est que les différents menus s'affichent en sur-brillance à l'écran,
alors que le combat fait rage. Il faut donc contrôler le barde (fuir le contact) le temps de réaliser cette combinaison de touche. Mal pensé. Cela dit, en progressant dans l'aventure
on découvre de nouveaux objets qui nous autorisent plusieurs invocations (jusque quatre) simultanées. De fait, pendant que l'on appelle à l'aide, un de nos coéquipiers peut se
charger des ennemis tandis qu'un autre nous protège. Chacune de ces invocations dispose d'une barre d'énergie qui s'effrite au fil des coups encaissés, une fois l'une d'entre elles
dissipées, libre à vous de la ré-invoquer. Attention toutefois à votre jauge de mana qui se recharge lentement.
En fin de compte The Bard's Tale est un jeu comme on en a déjà vu des dizaines ces dernières années. Un jeu qui s'autoproclame original et non linéaire.
Si l'originalité est perceptible dans la narration, elle ne va pas plus loin, quant à la linéarité, elle est bien présente : il y a bien dans divers donjons plusieurs
chemins, mais tous amènent au même point.
Un peu moins de 20 heures seront nécessaires pour atteindre la princesse, une durée de vie raisonnable comparée à la concurrence, mais qui se trouve considérablement augmentée
à cause d'une difficulté trop élevée par moment. Pour les habitués, ce sera probablement une promenade de santé, mais seront-ils prêt à se lancer une
énième fois dans un jeu du genre certes rigolo, mais globalement ennuyeux. Le déjà vu déborde de ce soft, si vous souhaitez un RPG évolué, préférez
les récents Jade Empire ou Kotor
II, plus jolis, plus longs, plus sympas, plus mieux.
Inspecteur Gadget - 10.05.2005